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Maria Pelletier, le développement durable ADN de tous ses projets

30/06/2016
Marianne Roumégoux
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Juriste ayant exercé dans la grande distribution, Maria Pelletier rachète l’entreprise Moulin Marion en 1984. Sans successeur, ses dirigeants s’apprêtent alors à laisser derrière eux une poignée de salariés. Souhaitant sauvegarder ce patrimoine meunier, la jeune femme et son époux, Michel, qui se charge des investissements et de la technique, abordent l’aventure sous l’angle entrepreneurial : « nous savions qu’il fallait trouver une nouvelle dynamique. Nous avons embauché un ingénieur agronome, rompu à l’agriculture biologique. Nous n’avions aucun a priori, ni positif ni négatif, sur ce mode de culture. Mais l’idée de s’intéresser à la qualité de ce que l’on met dans notre assiette, donc dans nos champs, nous a semblée plus que censée. » Le marché étant alors confidentiel en France, « nous allions vendre nos productions en Allemagne ». Se reconnaissant finalement dans cette philosophie, la dirigeante s’investit, dès les années 90, auprès des instances professionnelles pour participer aux réflexions sur la construction des filières biologiques. Membre du conseil du Synabio, mais aussi de la commission nationale de l’Agriculture biologique depuis, elle a notamment apporté son expertise lors du Grenelle de l‘environnement.

« Pour valoriser les coproduits du moulin et accompagner les producteurs que l’on incitait à la conversion au Bio, nous avons développé une activité de nutrition animale »

En parallèle, sa structure évolue. Dans le double objectif de « valoriser les coproduits du moulin et d’accompagner les producteurs que l’on incitait à la conversion à l’agriculture biologique, qui s’appuie sur la rotation des cultures, nous avons développé une activité de nutrition animale »… et construit une nouvelle unité !   « Oléoprotéagineux, épeautre, sarrasin,… Nous garantissions ainsi à nos producteurs partenaires des débouchés pour l’ensemble de leurs productions. » Le site produit aujourd’hui 12.000 t d’aliments. L’engagement, avec les 1.000 agriculteurs et éleveurs partenaires est contractualisé ou non, « car nous souhaitons respecter leur liberté entrepreneuriale. Mais certains nous accompagnent depuis le début ! »  Quant aux 6.200 t de farines, sur meules, cylindres ou attrition, elles alimentent des artisans, mais aussi des industriels et des GMS, dans un souci de diversification.

Une remise en question constante

Les Moulins Marion emploient désormais 28 personnes, dont 5 conseillers technico-commerciaux « auxquels il faut ajouter, de nombreux emplois indirects d’externalisation de fonctions de notre PME… » Un modèle auquel Maria Pelletier est attachée. Pionniers sur le Bio, « nous aurions pu nous développer plus vite, mais avons choisi de participer au développement de cette agriculture en nous engageant fortement auprès des institutions. » « Nous abordons chacune de nos décisions avec une vision à long terme. » Ainsi, pas de dividendes mais des réinvestissements systématiques dans l’entreprise. Chauffage à géothermie, prototype de production de vapeur à partir de granulés de bois pour les presses, isolation au chanvre, pas de traitement pesticide mais des méthodes de travail et des équipements adaptés, une réduction des nuisances… « Nous sommes en constante remise en question, et cherchons des solutions ’’propres’’ avec pour objectif de maintenir notre CA (10 M€) et l’emploi local. » Et la chef d’entreprise de s’interroger sur le bilan économique et social de la concentration des secteurs agricole et agroalimentaire pour rester compétitifs à l’international : « Ne serait-il pas plus intéressant de reconquérir les marchés intérieurs en préservant l’emploi et le maillage économique territorial, et ce d’autant qu’il y a une attente des consommateurs pour des productions locales ? » Evidemment, Maria pelletier a anticipé l’avenir : son fils, Julien-Boris, ingénieur en aéronautique a quitté son poste chez Airbus Hélicoptère et intégré l’équipe pour poursuivre l’aventure familiale. Et son cadet, Hugo, a rejoint la structure pour une formation d’ingénieur Agroalimentaire en alternance.

La Cop 21, une mobilisation à saluer mais encore inopérante

Le marché de l’AB est désormais mâture et les conversions se font plus facilement. Cela ne sonne pas pour autant la fin de la mobilisation pour cette femme de convictions, présidente de l’ONG Générations futures. Les alertes sur l’impact des pratiques de l’agroalimentaire sur la santé publique font de plus en plus écho auprès des décideurs, relaye-t-elle. « Maintenant on nous écoute! » On note aussi une prise de conscience environnementale comme l’atteste l’accord de la Cop21. « On ne peut nier cette mobilisation historique, et le travail de la France, mais elle n’est pas assortie d’engagement formel », regrette la militante. « Et l’on reste sur un système basé en priorité sur l’économie. » Une composante qui doit rester centrale, souligne-t-elle en sa qualité d’entrepreneur, mais être « pensée autrement. Il faut changer de paradigme. » Ainsi, « les PVD devraient appuyer leur croissance sur des productions locales, en exploitant des énergies renouvelables, comme le solaire, et travaillant sur l’agronomie pour préserver le potentiel des terres. Nous devons les aider à ne pas reproduire les erreurs que l’on paye cher aujourd’hui notamment en termes de santé publique et environnementale, mais également sociétale avec des charges qui explosent et un chômage croissant !» 

Commentaires:

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1 commentaire

Par Anonymous - July 8, 2016 13:18
Très bien Maria!!!
Amities
Jacques Denizet
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